Les manifestations de ce Samedi, à Quimper comme à Carhaix, ont montré l’ampleur des attentes de nos concitoyens.
Les manifestants ont dit leur angoisse devant l’état de l’économie française en général et de l’agroalimentaire breton en particulier. Le sentiment de dépossession ressenti par les salariés et les habitants des secteurs touchés par les fermetures d’usines est terrible. Il renvoi entreprises, coopératives, agriculteurs, Etat et collectivités locales à leurs responsabilités. C’est une colère sourde qui était exprimée dans les rues, tant les décisions sont brutales, faisant peu de cas des femmes et des hommes qui ont fait la prospérité des territoires. Un espoir unifiait, à mon sens, les participants de ces marches : que la Bretagne sache se rassembler pour peser à nouveau sur le cours de son histoire.
Cette angoisse, cette colère et cet espoir, comment ne pas les partager ? Comment ne pas les respecter ? Et en même temps, comment se résigner à les voir perverties par les portes-paroles du mouvement des “bonnets rouges” ?
Car ce que demandent les salariés, les chômeurs, les habitants des territoires touchés de plein fouet par la crise de l’agroalimentaire, c’est bien une action publique volontaire et efficace. Ils veulent que la puissance publique sauve ce qui peut l’être de la filière volaille, remette de la coopération et du bon sens dans la filière porcine, pèse en Europe pour préserver la pêche cornouaillaise, agisse pour l’égalité des territoires et lutte contre le mouvement naturel des économies à se concentrer à proximité des marchés et non dans les périphéries… Ils veulent aussi des indemnités à la hauteur de leur engagement dans leur travail, des formations pour rebondir, de l’action de développement et de prospective pour de nouveaux emplois…
Pourtant, bonnets rouges sur la tête, les portes-paroles du mouvement ont demandé sur tous les tons et dans tous les médias que “pour libérer les énergies, il faut moins de contraintes environnementales, moins de contraintes sociales et moins de contraintes fiscales”. Profitant de la détresse sociale d’une population, des idéologues de la baisse de la dépense publique prennent la tête d’un mouvement demandant plus de dépenses publiques.
Comprenne qui pourra, mais chacun a pu voir hier que le symbole du bonnet rouge, rappel d’une révolte anti-fiscale bretonne contre l’état français, n’était pas choisi au hasard. C’est bien à la constitution d’un “Tea Party à la bretonne” que nous avons assisté ! Nous les connaissons ici, en Pays de Quimperlé comme dans le reste de la Bretagne, ces élus qui votent toutes les dépenses -et pour qui il n’y en a jamais assez-, mais qui sont contre toutes les recettes -et pour qui il y en a toujours trop. Depuis 10 ans, ils étaient au pouvoir en France, ils le sont toujours en Europe et ils font mine de découvrir les conséquences des politiques libérales qu’ils ont mises en œuvre.
Mais, heureusement, je ne crois pas qu’ils soient majoritaires dans le mouvement qui s’est levé. L’espoir d’une Bretagne rassemblée, décidant à nouveau de son avenir dans la République, est la base de la période qui s’ouvre. Autour de l’écriture du Pacte d’Avenir, nos forces vives doivent imaginer la métamorphose de la Bretagne. Aucun sujet n’est tabou : décentralisation, expérimentations, glaz économie, transports, aménagement du territoire… Même nos singularités linguistiques et culturelles doivent être mobilisées –et donc entendues par l’Etat- pour refonder notre vivre ensemble.
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