Nous l’écrivions sur ce blog il y a quelques jours : “l’enjeu est de maintenir une Bretagne ouverte sur le monde, solidaire et fraternelle. Ce n’est plus une évidence. C’est désormais, plus que jamais, un combat”.
Si cet objectif est en passe d’être atteint sur notre région, l’état du pays nous interroge. Il se résume en deux mots : apathie et cancer. Deux mots forts, qui laissent à penser que le pronostic vital de la République est en cause.
L’apathie, si l’on consulte un dictionnaire, est un état d’indifférence à l’émotion, la motivation, la passion. C’est aussi un retrait de la vie sociale. Cela résume-t-il l’abstention ? Certes non, mais tout de même. En Bretagne, nous avions 11 listes qui concourraient aux élections. Et je ne reviens pas ici sur le contexte économique ou international. Comment comprendre que tant de nos concitoyens ne se soient pas déplacés, sinon justement par indifférence ?
Le cancer est une maladie caractérisée par une prolifération cellulaire anormalement importante au sein de l’organisme, de telle manière que la survie de celui-ci est menacée. Cela résume-t-il le vote FN ? Ces causes sont multiples, l’ensemble des électeurs ne partage pas l’envie de voir le FN appliquer son programme. Mais pourtant, qui peut prétendre qu’une fois le FN arrivé au pouvoir la démocratie et la République continueront ? La prolifération menace donc clairement la survie de l’organisme.
Le pronostic vital de la République est désormais engagé. Les deux faits conjugués, abstention et vote FN, mettent en péril la République. Dans son discours à la jeunesse, Jaurès expliquait ainsi la naissance de la République : “Dans notre France moderne, qu’est-ce donc que la République ? C’est un grand acte de confiance. Instituer la République, c’est proclamer que des millions d’hommes sauront tracer eux-mêmes la règle commune de leur action ; qu’ils sauront concilier la liberté et la loi, le mouvement et l’ordre ; qu’ils sauront se combattre sans se déchirer ; que leurs divisions n’iront pas jusqu’à une fureur chronique de guerre civile, et qu’ils ne chercheront jamais dans une dictature même passagère une trêve funeste et un lâche repos”. Chacun de ces mots a aujourd’hui un sens douloureux.
Il y a bien des causes conjoncturelles à ce vote des régionales. Nous pourrions les lister longuement. Elles n’expliquent pourtant pas la dynamique de long terme que nous constatons scrutins après scrutins. A Moëlan, nous avions senti venir cette vague dès les municipales de 2014. Plutôt que de nous écouter, on nous a demandé de nous taire… Il faudra bien pourtant que les partis politiques écoutent, sauf à passer la République par-dessus bord. Ramener nos concitoyens aux urnes, refléter enfin la vie, construire localement et nationalement des solutions aux crises, reprendre le chemin d’une République inclusive, redonner corps aux principes républicains, incarner différemment le pouvoir…
Les chantiers ne manquent pas, mais le grand poète allemand Höderlin écrivait que “Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve”.
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