Le 8ème festival de la parole poétique bat son plein dans un contexte un particulier. On a coutume de dire que la poésie est art majeur, avec une place mineure. Pourtant, avec la crise, jamais la poésie n'a été autant présente dans l'actualité. Comme l’eau, source de vie, la poésie sourde de partout. D’ailleurs, jamais le Festival de la Parole Poétique du Pays de Quimperlé ne s'est autant inscrit dans l'actualité. C’est en tout cas ce que j’ai voulu démontrer lors de l’inauguration du festival.
Pour qui regarde bien, la poésie est au cœur de l'actualité. C'est bien entendu le cas des prises de parole de Christiane Taubira, Ministre de la Justice, lors des débats récents à l'Assemblée Nationale sur le mariage pour tous. Elle y a fait preuve de tout le talent oratoire et de toute la fougue qu'on lui connaît. Mais elle a aussi ramené sur le devant de la scène une réalité trop souvent ignorée en métropole : les liens intimes entre poésie et politique, pour le courant littéraire dans lequel elle s'inscrit : la Négritude. D’Aimée Césaire à Léon-Gontran Damas, ces poètes, qui furent parfois aussi des élus de la République, ont marié poésie et politique. Et la Ministre de citer Léon-Gontran Damas, pour en appeler à l'égalité des droits : Nous les gueux, nous les peu / Nous les chiens, nous les rien /Nous les maigres, nous les Nègres / Qu'attendons-nous pour faire les fous / Pisser un coup sur cette vie / stupide et bête, qui nous est faîte. A la fin de son intervention, le Président de l'Assemblée Nationale s'est réjoui de la rencontre entre la poésie et la politique.
Le deuxième exemple, c'est bien entendu celui de Stéphane Hessel, l'indigné, l'humaniste, qui vient de nous quitter, emportant dans son dernier voyage les dizaines de poèmes qu'il connaissait par cœur et qu'il avait publiés, sous la forme d'un recueil intitulé : O ma mémoire : la poésie, ma nécessité. Il y remerciait les poètes, créateurs d'imaginaires et de langues affranchies des discours dominants, de soustraire leur public aux chaînes de l'ordre établi. Ils nous protègent, disait-il, contre l'automatisation, contre la rouille, qui menacent nos façons de vivre, de penser et de dire l'amour, la révolte, la lutte, la réconciliation, nos sentiments et nos convictions.
Ces deux exemples, qui ne sont pas dû au hasard, mais qui sont au cœur de l'actualité récente, montrent la place de la poésie. Elle est subversive, constructive, humaniste. Elle porte un message, par delà les tempêtes et les soubresauts. Elle maintient un cap : celui du beau, de l'amour, du progrès de l'humanité.
Le Festival est, cette année aussi, au cœur de l'actualité. Il nous parle de la Grèce. Parler de la Grèce, c'est parler de l'austérité, du temps qu'il fait sur la planète économie et du peu de cas qui y est fait des femmes et des hommes. Comment ne pas être fondamentalement pessimiste en voyant la Grèce aujourd'hui ? Mais comment oublier l'apport de ce pays à l'histoire de l'Humanité ? C'est finalement le même message des poètes de la Négritude, rebelles, créateurs, émancipateurs, magnifiant toutes les couleurs et toutes les misères du monde, à Stéphane Hessel, résistant, humaniste, indigné jusqu'à son dernier souffle. C'est le message universel du progrès humain, la lumière d'Athènes qui brille encore, et pour toujours, en chacun de nous et ce, par-delà les crises, par-delà les orages.
Vive la poésie, vive le Festival de la Parole Poétique !
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