Dimanche, avec votre choix, notre choix, nous allons clore une période politique commencée, pour moi, en 1995 (mais je suis jeune, je sais). C'est la période Chirac.
1995, l'incompréhension s'est installée entre la droite de Balladur et les citoyens. La question sociale est négligée, la dette file, file, file, la jeunesse est méprisée (CIP - slogan : "Papa, j'ai trouvé un emploi - Le tien !")... Jacques Chirac comprend et s'empare de l'étendard de la lutte contre la fracture sociale. Lionel Jospin, candidat de socialistes en pleine convalescence à la sortie du deuxième septennat de François Mitterrand, dégaine le droit d'inventaire et cherche à réhabiliter la parole politique : "Avec Jospin c'est clair".
Chirac élu, la France s'attend à ce que Philippe Séguin prenne les commandes à Matignon pour mener une politique inspirée du gaullisme social. Nous aurons Alain Juppé, droit dans ses bottes. C'est l'échec. Chirac annonce en Juin la reprise des essais nucléaires (slogan : "Ta mère est tellement irradiée qu'elle vote Chirac" ou "Avec Chirac la bombe pour tous"). Le décalage entre le discours et les actes est terrible. En Octobre, les universités se mettent en grêve, avec quelques amis j'animerais le mouvement en Finistère. En Novembre, les cheminots nous rejoignent contre les réformes "sociales" (sic) du gouvernement, très vite un mouvement social massif paralyse la France.
C'est l'impasse. En 1996, la question des sans-papiers surgit après l'occupation de l'église Saint-Ambroise à Paris, puis celle de Saint-Bernard. Le gouvernement déclare, par la voix du Ministre de l'Intérieur, Debré, que la question sera traitée avec "humanité et coeur". Le 23 août, les CRS entrent dans l'église Saint-Bernard en défonçant la porte à coups de hache. Quelques mois plus tard, à Brest, nous recevrons la "caravane des sans-papiers" à Pontanézen.
Avril 1997, Jacques Chirac réalise que la France ne pourra pas se qualifier pour l'euro s'il poursuit sa politique. Il veut mener une politique plus rigoureuse encore. Il dissout l'Assemblée Nationale.
Les socialistes gagnent les législatives et Lionel Jospin devient Premier Ministre. 35 heures, emplois-jeunes, PACS, Couverture Maladie Universelle, Allocation Personnalisée d'Autonomie, Contrats Territoriaux d'Exploitation, fermeture du réacteur Superphénix, accords de Nouméa, qualification pour l'euro (la monnaie, pas le championnat de foot !) et j'en oublie. Les promesses sont tenues, la situation de l'emploi s'améliore.
Mais des faiblesses demeurent : l'Europe peine à définir un cadre et un projet mobilisateur, la mondialisation fait sentir ses effets, la précarité de l'emploi progresse malgré les emplois créés, les relations avec les syndicats se dégradent, les impôts sont baissés après la polémique sur la cassette lancée par Chirac au lieu de les réinjecter dans des politiques sociales. La gestion prend le pas sur l'innovation, les socialistes pensent que la feuille d'impôt peut leur faire perdre les élections au moment même où l'éducation, le social, l'environnement et l'économie connaissent des évolutions majeures et demandent des interventions publiques renouvellées.
Le second souffle ne viendra pas. Les électeurs préféreront utiliser le premier tour de l'élection pour envoyer des messages, d'ailleurs confus, plutôt que de qualifier Lionel Jospin. Au vu du bilan, c'est injuste. Jacques Chirac craque l'allumette sécuritaire, avec démagogie et sans vergogne, il dénonce toutes les incivilités et promet toutes les sécurités. Coup de tonnerre ! Jean-Marie Le Pen est qualifié pour le second tour. Nous sommes le 21 avril 2002.
Un mouvement populaire se lève pour défendre la démocratie. Il est massif, festif, juvénile. Il ne durera pas. Chirac est élu, il ne tiendra aucun compte de "l'esprit de mai". Raffarin s'installe à Matignon : décentralisation bâclée dans la forme et dangereuse sur le fond, lois sécuritaires inefficaces, réforme des retraites injuste et qui ne règle pas la question du financement sur le long terme, sécheresse mal gérée par un gouvernement qui apparaît coupé de la réalité sociale du pays... Les échecs s'accumulent. En 2004, la sanction tombe : le PS remporte largement les régionales, les cantonales et les européennes ! Le gouvernement n'en tient pas compte, du Contrat Première Embauche aux émeutes des banlieues avec la proclamation de l'état d'urgence, il poursuit sa politique de casse, sans parler des baisses d'impôt pour les plus aisés ou de l'Europe, toujours l'Europe, avec le texte et le référendum râtés de 2005.
Au final que retiendra-t-on de positif de Jacques Chirac ? Le refus de la guerre en Irak. Sinon, ne resteront que les petits et grands arrangements, le chef de meute, le libéral drapé dans le social, l'homme aux milles promesses, l'affaiblissement de la parole politique en interne et l'affaissement de la France en Europe et dans le monde.
C'est de cette histoire que procèdent les principaux candidats que nous départagerons Dimanche. Sarkozy est l'héritier de Chirac, Bayrou son disciple, Le Pen son complice inavoué, Ségolène Royal son antithèse.
Bon choix !
NB : Cette note est la dernière avant Dimanche soir. Elle est partielle et partiale. Subjective, je sais. Pas de nouvelle note d'ici à Dimanche soir et pas de commentaires non plus pour vous. En effet, je les bloque jusqu'à Dimanche soir en conformité à la loi électorale. Par contre, je vous attends Dimanche soir avant 20h pour commenter en direct la soirée électorale.
Hello Nico !
Juste un petit message pour t'informer en direct le résultat de Merville.
On sait que ce n'est pas forcement représentatif, mais pour se mettre dans une ambiance positive pour commencer cette soirée voilà les résultats : 31% pour Royal, 24% Sarko, 22% Bayrou, 7% Le Pen
Bonne soirée à toi et bon courage pour écrire un commentaire toutes les heures ! En tout cas nous on regardera.
Les Morvan's
Rédigé par : Les Morvan | 22 avril 2007 à 19:26