Benoît Hamon, député européen et secrétaire national du PS, a pris la plume pour éclairer ceux qui seraient tentés par le vote Bayrou. Inlassablement, il nous faut expliquer que toute voix de gauche pour le candidat UDF sera comptabilisée comme un soutien à droite.
François Bayrou se propose de nommer un Premier ministre de gauche. Encore faudrait-il qu'un dirigeant de gauche veuille conduire une politique de droite ! Car il faut dissiper l'illusion de cette campagne présidentielle : la troisième voie centriste et libérale.
François Bayrou défie désormais Sarkozy et ses protecteurs. Sa pugnacité récente à débusquer la main invisible des puissances de l'argent derrière les actes de Sarkozy plaît à quiconque s'inquiète de la confusion des genres entre les intérêts privés et l'intérêt public. Il pose ingénument deux questions aux Français : pourquoi le gouvernement idéal ne naîtrait-il pas de l'addition des talents les plus remarquables de la gauche et de la droite ? La gravité de la situation ne commande-t-elle pas de combiner les bonnes idées de droite et les bonnes idées de gauche ? Et, suivez son regard, l'incarnation française de ce solide bon sens politique, c'est sa candidature... De cette posture, serait né, lit-on, un mouvement d'adhésion d'électeurs de gauche à la candidature Bayrou (1).
Or, à l'heure des bilans, François Bayrou propose pourtant un solide CV de ministre et de député de droite. Inspirateur de la révision de la loi Falloux et de la remise en cause de l'école publique, il parle désormais de la laïcité comme d'un «trésor national». François Bayrou a voté la réforme Fillon des retraites, la jugeant cependant trop timide car ne remettant pas en cause les régimes spéciaux. Il a soutenu toutes les politiques de réduction des cotisations sociales patronales, proposant même aujourd'hui la possibilité pour les entreprises de créer des emplois «sans charge». Il y a deux mois, les députés européens UDF, membres du groupe politique des libéraux européens, ont tous voté la directive Bolkestein qui accélère la dérégulation du modèle social français et la remise en cause des services publics.
François Bayrou a donc changé. C'est amusant, Sarkozy nous dit la même chose...
Pour étayer sa démonstration, François Bayrou vante l'exemple allemand. Il exalte le peuple allemand qui a «forcé» la CDU et le SPD à gouverner ensemble. L'imposture est totale. Ceux qui ont voté social-démocrate en Allemagne n'ont jamais souhaité cette alliance, pas davantage que ceux qui avaient voté conservateur pour ne plus voir Schröder au pouvoir. Les peuples sont étrangers à cette alliance. Ses seuls responsables appartiennent aux appareils respectifs de la CDU et du SPD. La grande coalition procède d'un accord négocié au cours de longues nuits, au terme d'un de ces marchandages de postes et d'attributions, au SPD le social, à la CDU la chancellerie, qui nourrit la défiance à l'égard de la démocratie.
Là où Bayrou voit la volonté des peuples de dépasser le clivage droite-gauche, il n'y a, en réalité, qu'un traditionnel jeu de donnant-donnant entre deux partis rivaux pour sortir d'une impasse politique et institutionnelle. Le 14 février, le magazine Stern publiait le verdict du peuple allemand : 57 % des sondés ne sont pas satisfaits du travail de leur gouvernement.
Tout juste peut-on observer qu'un vainqueur semble se détacher de ce deal. Les enquêtes montrent que le SPD accuse désormais un retard de dix points sur la CDU dans les intentions de vote, alors que les deux formations étaient au coude à coude en novembre 2005 à la naissance de la coalition (source institut Forsa).
Sans s'arrêter sur le fait de savoir si ce modèle est souhaitable, est-il simplement transposable dans notre pays ? Non. Quoi qu'en dise Bayrou, le choix pour son parti n'existe pas. Il n'a d'ailleurs jamais existé. Cette solution est impossible en France, là où les députés UDF sont tous élus grâce à un accord de désistement avec l'UMP. Inversement, propose-t-on sérieusement aux électeurs socialistes d'élire demain un député de ce parti qui célèbre encore ses glorieux anciens Giscard, Poniatowski ou Lecanuet ?
Une fois le vent rebelle évanoui, il demeure une réalité incontournable : Bayrou appartient et doit tout à un seul camp. Toute voix de gauche qui se portera sur le candidat Bayrou sera immédiatement comptabilisée comme un soutien à une politique de droite. Pis, si, par conséquent, la droite venait à l'emporter, toute voix de gauche qui se sera portée sur Bayrou viendra grandir la légitimité électorale de la droite à, par exemple, remettre en cause le droit de grève ou augmenter le tribut payé par les salariés à la flexibilité du marché du travail.
Electeurs de gauche qui seraient tentés, exigez deux engagements de François Bayrou avant de valider votre choix : premièrement, s'il est éliminé du premier tour, François Bayrou doit appeler à voter Ségolène Royal en cas de duel avec Nicolas Sarkozy ; deuxièmement, lors des élections législatives, l'UDF ne passera pas d'accord de désistement réciproque avec l'UMP en faveur du candidat de droite le mieux placé au premier tour.
J'ai mon idée sur sa (non-) réponse...
François Bayrou est incontestablement un homme respectable. Mais ça n'est pas le sujet ici. Ce qui est en cause, c'est la clarté de son projet politique, la réalité de ses marges de manoeuvre et le chemin pour notre pays demain. Dès lors que le doute existe, le 21 avril 2002 vient rappeler aux électeurs de gauche que toutes les voix sont nécessaires dès le premier tour pour l'emporter et changer la donne. Ségolène Royal est le bon choix.
(1) Voir, entre autres, Libération du 22 février 2007, «Nous, spécialistes et Français de gauche...» p. 28.
Rentre chez toi.
Rédigé par : boby | 23 février 2007 à 22:03
Rentre chez toi.
Rédigé par : boby | 23 février 2007 à 22:03
Pardon ?
Rédigé par : Nicolas | 24 février 2007 à 00:11